L’eau dans la région euro-méditerranéenne

L’eau dans la région euro-méditerranéenne : une ressource et des enjeux partagés
Par Diala Gemayel | 09/11/2009

C'est à Beyrouth, les 6, 7 et 8 octobre derniers, que le Réseau méditerranéen des organismes de bassin (Remob) a tenu un séminaire et son assemblée générale, et que le Semide (Système euro-méditerranéen d'information sur les savoir-faire dans le domaine de l'eau) a mené son groupe de travail. Un agenda chargé a permis de présenter les avancées et les obstacles en matière d'eau, et d'entériner la participation active du Liban dans la Politique européenne de voisinage. En effet, Fadi Comair, directeur général des ressources hydrauliques et électriques du ministère de l'Énergie et de l'Eau, a été élu président du Remob.

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À elles seules, l'eau et l'agriculture ont constitué une table ronde thématique. Comme l'a souligné Belkacem Dhimi, du secrétariat d'État chargé de l'Eau et de l'Environnement au Maroc, il faut « en gérer la rareté et la vulnérabilité », tout en faisant face à une « demande accrue ». De ce fait, il faut « accroître l'offre, mais aussi maîtriser la demande » et, chose nouvelle dans la plupart des pays, « valoriser le mètre cube alloué à l'agriculture ».
Le Libanais Fadi Karam, chercheur au Lebanese Agricultural Research Institute (LARI), a exposé les difficultés récurrentes rencontrées dans la Békaa : tuyaux défectueux, mauvaise gestion, difficultés d'acheminement... Pour essayer de pallier les ennuis des agriculteurs, une carte magnétique de retrait d'eau a été expérimentée. Certes très coûteuse, celle-ci a tout de même permis une répartition de l'eau mieux maîtrisée et plus juste.
Autre grand danger d'une agriculture mal adaptée : l'usage intensif de pesticides et de fertilisants. Comme l'a rappelé Adib Geadah, ingénieur hydraulique et consultant auprès de l'office national libanais du Litani, ceux-ci sont hautement toxiques « pour les eaux souterraines », bases de soutènement essentielles aux fleuves, rivières, lacs et autres réservoirs naturels. Et l'expert de présenter un plan de pompage-turbinage pour le Liban, « méthode qui n'y a jamais été mise en place jusqu'à aujourd'hui », et pour lequel il a repéré pas moins de « neuf sites exploitables ».
Ces propositions de gérance à l'échelle régionale, voire nationale, ont trouvé leur application dans le projet-pilote du bassin versant du Jucar, en Espagne, présenté par Javier Ferrer, chef du département du planning hydrologique. Depuis 2002 et suivant les objectifs de la Directive cadre européenne sur l'eau (DCE), cet espace hydrographique a enregistré des améliorations notables, telles que la réduction de l'extraction urbaine, la stabilisation du rapport rivière-aquifère et l'uniformisation de la gestion des ressources. Résultat : le réservoir ainsi créé permet déjà de résister à une éventuelle sécheresse.

Échange d'informations et de savoir-faire
L'autre pôle de cette rencontre, à savoir la réunion du groupe de travail monitoring sur l'eau, a été organisé par le Semide. Initié en 1997, le Semide est une initiative du partenariat euro-méditerranéen. Il fournit un outil stratégique pour l'échange d'information et de savoir-faire dans le domaine de l'eau entre et à l'intérieur des pays du partenariat euro-méditerranéen et les 10 pays partenaires (Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Palestine, Syrie, Tunisie et Turquie). Sa mission couvre trois objectifs : faciliter l'accès à l'information à travers les institutions, la documentation, la formation, la recherche et le développement et l'administration des données ; développer la mise en commun de l'information ; et enfin, développer des produits communs et des programmes de coopération. Son budget, pour la tranche d'activités 2004-2008, a été de 3,3 millions d'euros (2 millions d'euros alloués par le MEDA et 1,3 millions par l'Espagne, l'Italie et la France).
L'un des premiers objectifs du groupe de travail sur les réseaux de monitoring du processus conjoint entre la Directive cadre sur l'eau de l'Union européenne (DCE) et la composante méditerranéenne de l'Initiative Eau (Med-EUWI) est d'établir un état des lieux sur les réseaux et programmes de monitoring dans les pays partenaires méditerranéens. Dans ce cadre, le Semide a mené une enquête entre avril et août 2009, dont il a présenté l'analyse et les résultats à Beyrouth. Ceux-ci sont cruciaux pour le travail du Semide, en ce sens qu'ils réactualisent, auprès des dix partenaires, les informations concernant les cadres légal et institutionnel, les mécanismes et réseaux de surveillance de la qualité des eaux, et l'exploitation et la diffusion des données.
Si le Liban ne peut pas encore se vanter d'être un bon élève comme l'Espagne, il n'en reste pas moins que son ministère de l'Énergie et de l'Eau (MEE) travaille activement à le devenir. « Aujourd'hui, le MEE, les établissements des eaux et l'office national du Litani sont conscients de la nécessité de disposer de données fiables et à jour pour assurer une bonne gestion », précise Éric Mino, coordinateur et gérant de l'unité technique du Semide. « C'est devenu une priorité. Mais il va d'abord falloir renforcer les moyens (notamment les réseaux de mesure) et les capacités des établissements pour traiter ces données de manière harmonisée, puis organiser les échanges de données entre les différents acteurs », ajoute-t-il.

Renforcement du cadre de coopération
Toujours selon la norme fédératrice voulue par l'Union européenne, chaque pays devrait se greffer au Semide via son point national focal, le plus souvent représenté par le ministère de l'Eau. « L'un des principaux défis relatifs au secteur de l'eau au Liban réside dans la protection des ressources de la pollution par les usages de l'eau, notamment en renforçant le traitement des eaux usées », poursuit Éric Mino. « La loi sur l'eau de 2000 (ou loi 221 consultable en ligne sur le site http://www.semide-lb.org), qui intègre les principes généraux de la gestion intégrée des ressources en eau, doit permettre de relever ce défi. Le deuxième défi majeur est le renforcement du cadre de coopération entre les acteurs de l'eau. Cela est vrai aussi bien pour la gestion des données qui impose de savoir qui fait quoi, mais aussi impose des règles déontologiques sur l'échange et la mise à disposition des données, que pour des domaines tels que l'agriculture ou celui de la qualité des eaux », conclut l'expert.

*Europa Jaratouna est un projet médiatique initié par le consortium L'Orient-Le Jour, al-Hayat, LBCI, et élaboré avec l'aide de l'Union européenne. Il traite des actions de l'UE dans 8 pays du sud de la Méditerranée. Pour en savoir plus, visitez le site www.eurojar.org. Le contenu de cette  publication relève de la seule responsabilité de L'Orient-Le Jour et ne peut aucunement être considéré comme reflétant le point de vue de l'Union européenne

Reference lÓrient Le Jour